🔒De nouvelles méthodes de production d'Oméga-3
Produire des oméga-3 sans poisson, sans krill, voire parfois sans microalgue : tour d’horizon des biotechnologies « alternatives » qui étudient la fermentation de précision, les plantes transgéniques, la culture cellulaire.
Pour quelles raisons aller chercher « ailleurs » les sources d’oméga-3 ? Nous les connaissons toutes : surpêche appauvrissant les ressources océaniques, utilisation massive par l’aquaculture de co-produits de la pêche (dont les huiles), hausse des températures des océans liée au réchauffement climatique…
La totalité de l’EPA et du DHA actuellement issu des océans ne pourront donc plus répondre à la demande (sources GOED, Good Food Institute GFI (GFI), une organisation à but non lucratif). D’où la nécessité de mettre en place de nouvelles chaines d’approvisionnement.
- Les cultures transgéniques
Le centre de recherche britannique Rothamsted Research a modifiĂ© gĂ©nĂ©tiquement la plante Camelina sativa pour qu’elle synthĂ©tise en grandes quantitĂ©s du DHA et de l’EPA. Rothamsted Research collabore avec la sociĂ©tĂ© amĂ©ricaine, Yield10 Bioscience, pour commercialiser cette nouvelle culture. Yield10 Bioscience affirme que les lignĂ©es de cameline modifiĂ©es produisent environ 20 % d’acides gras EPA et DHA (un rendement similaire Ă la composition de l’huile de poisson de l’hĂ©misphère nord). L’huile obtenue est Ă©quivalente Ă l’huile de poisson « de base » naturellement titrĂ©e en OmĂ©ga-3 (versus les huiles concentrĂ©es). Une approche d’autant plus intĂ©ressante que « l’agriculture » prĂ©senterait un bilan Ă©conomique très intĂ©ressant versus les cultures cellulaires voire les voies fermentaires.
- La fermentation de précision
Cette technique utilise des micro-organismes (levures, bactĂ©ries) pour synthĂ©tiser des molĂ©cules spĂ©cifiques d’intĂ©rĂŞt. Ainsi la levure olĂ©agineuse Yarrowia lipolytica, est capable d’accumuler de grandes quantitĂ©s de lipides cellulaires. En 2013, par exemple, des recherches ont permis de modifier le profil lipidique de la levure, pour que le pourcentage en EPA y soit très Ă©levĂ© (plus de 55%) versus les acides gras saturĂ©s. Les diffĂ©rents hĂ´tes putatifs ont des avantages et des inconvĂ©nients diffĂ©rents. Ils peuvent ĂŞtre optimisĂ©s pour une plus grande efficacitĂ©, et la variĂ©tĂ© des voies mĂ©taboliques par lesquelles ces composĂ©s peuvent ĂŞtre produits laisse une grande place Ă l’optimisation, tant « dans l’intĂ©rĂŞt du coĂ»t et de l’Ă©chelle que dans l’intĂ©rĂŞt de l’optimisation du profil d’acides gras du produit final. » (GFI).
- La culture cellulaire
Cette technique est prĂ©emptĂ©e (pour l’instant) pour produire des produits « carnĂ©s ». La start-up espagnole Cubiq Foods met au point du DHA et de l’EPA cultivĂ©s dans des cellules de canard, ainsi qu’une sĂ©rie de graisses cultivĂ©es pour des applications alimentaires. Elle a dĂ©jĂ partiellement soumis un dossier Novel Food Ă l’AutoritĂ© europĂ©enne de sĂ©curitĂ© des aliments (EFSA) et vise Ă commercialiser un produit omĂ©ga-3 cultivĂ© d’ici 2025. La culture in vitro de cellules animales permettrait par exemple de produire des acides gras Ă chaines plus longues que C18 – ce que les bactĂ©ries ne peuvent pas faire. Outre l’argument de la durabilitĂ©, un autre avantage de la production de DHA et d’EPA par culture cellulaire est la possibilitĂ© de modifier le format nutritionnel. Cubiq Foods travaille Ă©galement sur un deuxième produit qui utilise le gĂ©nie gĂ©nĂ©tique pour obtenir des niveaux de DHA et d’EPA encore plus Ă©levĂ©s que les acides gras omĂ©ga-3 conventionnels.
- La culture verticale in-door
Les microalgues sont connues pour être des sources d’oméga 3 (cf pages suivantes) depuis quelques années déjà . Les acteurs de ce marché sont connus : DSM, KD Pharma, Polaris, Fermentalg, Solutex, Algarithm Ingredients, Arizona Algae Products, Nu-Mega Ingredients, Qualitas Health. D’autres sont de nouveaux acteurs, comme Pharma Marine (voir ce numéro), Huve Nutraceutical. Pour autant, il est possible d’aborder la problématique du DHA et EPA d’origine algale autrement. Et notamment sous l’angle de l’empreinte carbone. C’est ce que fait Örlo Nutrition (groupe islandais Vaxa) qui revendique utiliser un process de production de ses oméga-3 (sous forme polaire phospholipides et glycolipides) à empreinte carbone négative, une première dans le monde. Installé à proximité d’un site de géothermie, le site utilise des photobioréacteurs et une plateforme pilotée par intelligence artificielle (machine-learning).
Entre l’exploration de nouvelles sources d’Oméga-3 et des techniques de productions novatrices, le champ d’exploration des Oméga-3 est promis à un bel avenir.